Jean-Patrick CAPDEVIELLE : "Toute la gestion de ma "carrière" était basée sur le n’importe quoi"

Par Thierry Cadet
Le 8 février 2016
8 mins
Jean-Patrick CAPDEVIELLE : "Toute la gestion de ma "carrière" était basée sur le n’importe quoi"
Crédit photo : Facebook officiel / Catherine Beudaert

Au printemps dernier, Jean-Patrick CAPDEVIELLE proposait à ses fans de l'aider à financer son nouvel album (voir sur ce lien), le digne successeur d'"Hérétique 13" paru en 2007. Depuis, devant la générosité de son public, le disque a été réalisé, et est à présent disponible (voir sur son site officiel). "Bienvenue au paradis" est un album plus efficace mélodiquement parlant que l'opus précédent ; ce que lui a fait remarquer le journaliste Bastien KOSSEK lors d'une interview pour Hors Format. "Vous savez, je n’ai rien contre le fait de faire des chansons efficaces (rires). J’ai un agent qui va entrer en contact avec les médias. J’ai la chance d’avoir des personnes qui m’aiment bien à des échelons stratégiques dans certaines radios m’a-t-on dit… Il parait que le président d’une des plus importantes radios nationales écoute souvent mes chansons dans sa voiture (sourire). Mais les radios font toujours des tests pour rassurer leurs annonceurs ; et même si ces tests se révèlent très positifs pour moi quand ils passent mes anciens titres, on peut se demander si c’est simplement un effet de nostalgie, ou si ça fonctionnerait aussi sur des nouveautés ?".

Jean-Patrick CAPDEVIELLE l'homme d'un seul tube "Quand t'es dans le désert", malgré une quinzaine d'albums à son actif, et quelques autres succès à l'époque qui ne seront pas restés dans les mémoires collectives (de "C'est dur d'être un héros" à "Oh, Chiquita"), aura passé sa carrière à fuir toute efficience, de peur de passer pour un chanteur de variété. "J’ai un instinct très sûr pour rejeter, parmi les chansons de mes albums, celles qui sont les plus "faciles". Au début de ma carrière, avant de partir à Londres enregistrer mon premier album, je me suis aperçu que l’une des chansons que j’avais composées avait une mélodie très proche de "Je l’aime à mourir" de CABREL. Ça m’a beaucoup dérangé, et comme je n’avais que neuf chansons, j’ai donc décidé de la remplacer. J’ai composé ce qui deviendra "Quand t’es dans le désert" à toute allure… Il y a trois ou quatre accords, ça m’a pris cinq minutes. Pour ce qui est des paroles, je les ai écrites dans l’avion". Une fois en studio, Jean-Patrick CAPDEVIELLE ne voulait plus qu'elle soit sur le disque, et encore moins qu'elle soit un single. "Elle s’est imposée malgré moi. Pendant deux ou trois albums, ça s’est passé ainsi : on choisissait le single pour moi et j’avais des hits. Un jour, j’ai enfin décidé d’imposer mes choix… et je n’ai plus fait de hit". 

A cette époque-là, les journalistes sont peu enthousiastes concernant les opus "Deux" ou "Le long de la jetée". C'est le début d'une longue défiance entre le chanteur et le monde de la critique. CAPDEVIELLE défie ce dernier en 1982 avec un album au titre explicite : "L'ennemi public". "Un certain Rémy KOLPA KOPOUL s’est décidé à me démolir. KOLPA KOPOUL titrait : "Un danger nouveau menace le rock français : le Capdeviellisme" ajoutant que d’autres, comme BASHUNG, risquaient de s’engouffrer dans cette brèche. Le pauvre BASHUNG faisait de la musique depuis dix ans ! Il n’avait certainement pas besoin de moi ! Je ne me suis pas laissé faire, j’ai répondu. Notamment en chanson, avec "Qu’est-ce qui va rester (quand le rock’n’roll aura cessé d’exister) ?". Ils m’ont dit : "Pas toi !". Pourquoi s’en sont-ils pris à moi de cette façon ? Yves BIGOT (ndlr : Président de TV5 Monde, ancien directeur des programmes de RTL et des variétés d’Antenne 2) m’a éclairé à ce sujet. Pour lui, c’est de la jalousie pure et simple : "Les journalistes se sont tous fantasmés dans ce rôle de DYLAN/SPRINGSTEEN à la française ; toi, tu l’as fait".

 

LE SAVIEZ-VOUS ?

Avant d'être chanteur, Jean-Patrick CAPDEVIELLE a été journaliste à "Salut les copains" ou "Mademoiselle Age Tendre" revient longuement pour Hors Format sur ces chanteurs de variété qu'il aura croisés tout au long de sa carrière. "J’ai un souvenir très précis datant du début de ma carrière, alors que je vivais en Espagne. SHEILA avait fait une émission où elle s’était fait démolir par une spectatrice présente dans le public. Quand SHEILA, sans doute vexée, lui avait demandé ce qu’elle écoutait, la jeune fille avait répondu : "Jean-Patrick CAPDEVIELLE". "Evidemment !" avait rétorqué SHEILA. Moi, cette histoire m’a plutôt gêné : si SHEILA est devenue ce qu’elle est devenue, c’est parce qu’elle était la meilleure parmi toutes celles qui rêvaient d’être SHEILA, et personne n’a jamais été contraint de l’écouter. Quant à Michel DELPECH, vous tombez mal ! J’adore son timbre. Je me suis d’ailleurs pas mal engueulé avec des gars issus du milieu du rock quand je disais ça, tout en précisant que je n’étais pas très client de ses chansons …/… Vous savez, je ne suis pas reconnu par le milieu rock, non plus. Il n’y a que MANSET qui pense que je suis le seul chanteur de rock qu’il n’y ait jamais eu en France (rires) ! Je n’ai rien fait, non plus, pour être accepté par l’un ou l’autre camp. Je ne revendique pas l’étiquette du chanteur de rock. Je fais de la musique électrique, voilà tout …/… Il n’y a aucun mépris dans ce que je vais dire, mais il m’est arrivé de passer dans des émissions de télé entre SHEILA et DALIDA, et ça me mettait mal à l’aise. Tous ces gens faisaient de la musique de divertissement, et j’étais persuadé de faire autre chose. Ce n’était pas le même univers".

Jean-Patrick CAPDEVIELLE est par ailleurs l'auteur du hit de la regrettée Linda WILLIAM', "Traces" en 1988, sur une musique de Romano MUSUMARRA.  

Thierry Cadet